A deux pas de la rivière d'Auray dans le Morbihan, un rectangle de cultures attire l’œil. Ce sont les six hectares et la douzaine de tunnels de la station d’expérimentation d’Auray. Les stations d’expérimentation sont toutes des outils de recherche et développement, mais à Auray, on se croirait presque dans un film de science-fiction : on peut y croiser des testeurs en exosquelettes ou revêtus d’une combinaison truffée de capteurs et des robots qui aident au transport, désherbent ou binent. La station d’Auray prépare le maraîchage 3.0 : celui qui épargnera au professionnel les troubles musculosquelettiques et lui permettra de limiter les intrants. Mais cette recherche d’une agriculture qui prend soin à la fois de ses travailleurs et de l’environnement ne passe pas seulement par la robotique : Maët Le Lan, responsable de la station, refuse qu’elle soit rangée dans une case et souligne au contraire la grande diversité des thématiques abordées qui fait la force d’Auray. On y teste aussi bien les différents matériaux pour le paillage que l’amélioration des rotations, mais on y expérimente aussi des cultures nouvelles.
De nouveau goûts locaux dans un contexte en mutation
Pastèques, patates douces et arachides, ces plantes qui détonnent dans le paysage maraîcher breton répondent à la nécessité de renouveler la gamme traditionnelle de légumes locaux. Mais il s’agit également de trouver des réponses d’adaptation aux évolutions climatiques tout en permettant de remplacer des importations par une production locale : la pastèque dont la demande augmente avec des étés bretons de plus en plus chauds est pour l’instant essentiellement originaire d’Espagne. La station d’Auray veut aider à diversifier l’offre locale avec du goût et des produits faciles à préparer en cuisine. Quant à l’arachide, son expérimentation s’inscrit dans la vogue des fruits secs aux facteurs aussi bien climatiques que nutritifs.
Sécuriser l’itinéraire technique
Les cycles de tests réalisés à Auray aboutissent à des itinéraires techniques qui permettent aux producteurs de ne pas se lancer à l’aveugle. Ainsi celui sur la patate douce en agriculture biologique montre -entre autres- qu'il vaut mieux espacer les plants pour obtenir des patates de gabarit satisfaisant (hors vente sur place) et que les patates douces à chair blanche ont de bons rendements et de bonnes aptitudes à la conservation. Pour Maët Le Lan, la station a les moyens de prendre des risques que les maraîchers ne peuvent se permettre d’affronter. Car les mauvaises surprises ne manquent pas quand on se lance dans les variétés nouvelles : récolte décevante à la suite d’une météo capricieuse pour les patates douces, problèmes sanitaires comme une attaque d’acariens pour les arachides.
« Cent fois sur le métier…»
La cacahuète bretonne se fera-t-elle une place sur la table des apéritifs ? Il faudra auparavant trouver une solution pour torréfier les graines. Cela n’a pas empêché quelques agriculteurs locaux de se lancer dans l’aventure de cette curieuse légumineuse (voir encadré) d’autant que les restaurateurs locaux se verraient bien inscrire à leur menu des recettes à la cacahuète produite localement. Mais à Auray, le travail d’expérimentation va continuer pendant plusieurs années, notamment pour améliorer le contrôle des acariens par les auxiliaires et permettre à la cacahuète bio de Bretagne d’être réellement viable. L’expérimentation est une course de fond.
Pour en savoir plus : page consacrée à la station d'Auray sur le site des chambres d'agriculture de Bretagne.